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    En bref:

    – Amélioration visuelle et thème automatique : Première version à proposer par défaut les quatre coins arrondis pour les fenêtres et introduit la bascule automatique entre thèmes sombre et clair selon l’heure, avec des fonds d’écran dynamiques et KNightTime pour ajuster la température d’écran.

    – Presse-papier et fonctionnalités pratiques : Le presse-papier Klipper permet maintenant de marquer des entrées comme favorites pour les conserver en permanence, avec support de l’encre d’imprimante, bouton mise en veille prolongée sur l’écran de connexion et recherche “floue” dans KRunner.

    – Support Wayland et performances : Nouvelles capacités Wayland avec mode picture-in-picture et protocole “pointer warp”, plus les “plans de superposition” qui améliorent les performances des jeux et réduisent la consommation lors de la lecture vidéo.

    La nouvelle version de l’environnement Plasma pour les distributions Linux est disponible depuis peu en bêta. L’équipe de développement a décidé de lui donner certaines capacités visuelles qui lui faisaient défaut, dont la bascule automatique des thèmes. Mais on trouve aussi bon nombre d’améliorations dans tous les recoins.

    Maintenant que GNOME 49 est disponible en version finale, les regards se tournent vers la prochaine évolution majeure de l’autre grand environnement de la sphère Linux, à savoir KDE Plasma. La bêta de la version 6.5 est disponible depuis quelques jours et plusieurs distributions permettent de la tester.

    Précisons néanmoins qu’il n’est pas si aisé d’essayer ces nouveautés, car peu de ces distributions fournissent un environnement Plasma sans modifications. Nous avions porté notre dévolu sur KDE Neon Testing, pour obtenir une expérience inchangée, mais la branche de test affiche toujours Plasma 6.4.5. Contrairement à ce qu’indique l’équipe de KDE dans sa présentation, c’est la branche Unstable qui dispose actuellement de Plasma 6.5.

    Plusieurs améliorations visuelles

    Plasma 6.5 introduit diverses nouveautés pour l’interface. par exemple, c’est la première version de l’environnement à proposer par défaut les quatre coins arrondis pour les fenêtres, plutôt que seulement deux en haut et deux coins carrés en bas. Ce n’est pas une révolution, mais Plasma se retrouve aligné désormais avec ce que l’on peut voir dans Windows, macOS et la plupart des distributions Linux fournies avec GNOME (quand les applications sont pleinement compatibles GTK4).

    Le nouveau Plasma introduit également la bascule automatique entre les thèmes sombre et clair selon l’heure de la journée. Cette fonction, qui existe depuis longtemps dans GNOME et macOS, permet de changer pour un thème sombre à l’heure du coucher du soleil, afin de fournir un environnement moins agressif pour les yeux. Comme les autres systèmes, on peut toutefois paramétrer cette bascule ou la désactiver. À noter également que Plasma 6.5 propose des fonds d’écran adaptés (« dynamiques ») et que l’on peut personnaliser quel fond est utilisé dans un mode spécifique. Le choix du thème apparait aussi dans Paramétrage rapide, à l’ouverture de l’outil Configuration.

    L’équipe ajoute avoir procédé à de nombreux petits ajustement un peu partout pour améliorer la lisibilité des textes, réduire les clignotements et ajouter des correspondances visuelles à tout ce qui pourrait déclencher un son.

    Plasma 6.5 introduit dans le même temps KNightTime. Comme son nom l’indique, la fonction ajuste automatiquement la température de l’écran selon l’heure de la journée, un comportement désormais classique dans les systèmes d’exploitation. Là encore, ce comportement peut être désactivé.

    Nombreux petits ajouts pratiques

    Les notes de version de Plasma 6.5 contiennent une longue liste d’ajouts plus ou moins notables, mais dont beaucoup s’annoncent pratiques. Exemple simple, mais parlant : la prise en charge du niveau d’encre des cartouches d’imprimante, et la possibilité de recevoir des alertes quand ce niveau devient bas.

    On trouve également plusieurs améliorations notables du presse-papier et de l’application qui l’accompagne, Klipper. Plasma 6.5 ajoute ainsi une fonction réclamée depuis longtemps : pouvoir marquer certaines entrées comme favorites afin de les y enregistrer de manière permanente. Qu’importe alors le redémarrage de la machine, on pourra ressortir les éléments régulièrement collés les fois suivantes. Autre fonction, le support de la synchronisation du presse-papiers entre le client et le serveur lors de sessions de bureau à distance.

    On continue dans les ajouts pratiques avec l’apparition sur l’écran de connexion d’un nouveau bouton pour déclencher la mise en veille prolongée de l’ordinateur, si le système détecte une configuration compatible. Un ajout semblable à celui des contrôles média de GNOME 49 sur l’écran de connexion, que KDE possédait déjà.

    Et ça continue

    Il est difficile de rassembler les nouveautés de Plasma 6.5, tant elles sont réparties dans de nombreux composants. Par exemple, le widget Sticky Notes est beaucoup plus pratique, grâce à plusieurs améliorations : la couleur déjà utilisée est indiquée dans le menu, la couleur de la note est affichée dans le menu contextuel, l’ensemble est plus lisible en fonction du thème, et la fenêtre popup peut être redimensionnée.

    On note aussi l’apparition d’interrupteur dans les paramètres rapides pour des éléments comme le Bluetooth, qui évitent de devoir cliquer sur la catégorie pour activer/désactiver un élément. On continue avec un petit rattrapage sur GNOME dans la gestion des pilotes, puisque la boutique Discover peut maintenant en gérer l’installation si besoin. Les développeurs indiquent que cette modification est utilisée avec succès depuis plus d’un an sur la distribution Solus.

    Autre nouveauté très bienvenue, une page de configuration permet de rassembler toutes les permissions données aux applications basées sur des portails. Même si on pense tout de suite aux paquets Flatpak, l’équipe précise que c’est bien pour l’ensemble des portails. Pour une application, on peut ainsi voir les autorisations accordées et les désactiver si besoin. Par exemple, couper l’accès aux notifications, lui retirer sa priorité haute, ne plus lui permettre d’empêcher la mise en veille, bloquer la géolocalisation, etc.

    Encore un peu ?

    Les recherches dans KRunner deviennent en outre plus pratiques. Le composant supporte en effet désormais la recherche « floue » pour les applications : on peut retrouver ce que l’on cherche non pas en indiquant le nom exact, on peut la décrire avec des termes génériques, qui peuvent même contenir des erreurs (dans une certaine mesure). Cette recherche prend aussi en charge les raccourcis globaux. Si vous cherchez par exemple à effectuer une capture d’écran d’une zone spécifique, il suffit de décrire le résultat à KRunner pour qu’il vous indique le bon raccourci.

    Plasma 6.5 contient – inévitablement – des améliorations liées au support de Wayland. L’environnement prend ainsi en charge le mode picture in picture du « nouveau » serveur d’affichage, ainsi que le protocole « pointer warp ». Ce dernier permet à un client (comme une application) de téléporter le curseur de la souris d’un endroit à un autre. L’équipe indique que pour limiter les dérapages, cette faculté ne sera gérée qu’au sein de la fenêtre étant au premier plan.

    On continue avec plusieurs nouveautés pour les tablettes. Le nouveau Plasma permet notamment de configurer les molettes, quand la tablette utilisée en contient. Ces molettes sont le plus souvent utilisées pour appliquer un niveau de zoom ou pour modifier la taille du pinceau. De même, leurs versions tactiles sont également prises en charge, comme on les retrouve parfois sur les modèles Wacom. Plasma permet alors d’en modifier le comportement, voire de les désactiver.

    Enfin, signalons que Plasma 6.5 introduit les « plans de superposition » pour le traitement graphique. Le procédé évite de calculer notamment ce qui se trouve derrière une fenêtre et donc de ralentir la composition de l’ensemble. Selon l’équipe de développement, cet ajout améliore les performances et la latence pour les jeux en mode fenêtré, tout en réduisant « considérablement » la consommation d’énergie lors de la lecture vidéo. Cette capacité est encore incomplète et ne fonctionne par exemple pas sur les configurations HDR. De plus, on ne peut s’en servir que pour une seule sortie par GPU, donc pas en mode multi-écrans.

    La version finale de Plasma 6.5 est attendue pour le 21 octobre. Notez que l’un des grands apports prévus, KDE Initial System Setup (KISS), est finalement reporté à la version 6.6.

    – Source :

    https://next.ink/201208/kde-plasma-6-5-arrondit-ses-angles-et-sadoucit-la-nuit-venue/

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    Gros fan de KDE, gros fan d’Archlinux. Cool ! 🙂

    Et oui @michmich KDE est assez gourmand et plein d’options, faut aimer. J’apprécie sa personnalisation à outrance. Longtemps, toujours, utilisateur d’XFCE sur les petites configs, j’aime l’élégance de Plasma.

    Bon, je cerne pas trop l’intérêt d’une distribution dédiée vu qu’on trouver et peut avoir KDE sur tout ou presque mais pourquoi pas.

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    Dans le cadre des 20 ans de Fedora-fr et du Projet Fedora en lui-même, Nicolas Berrehouc alias Nicosss et moi-même (Charles-Antoine Couret alias Renault) avons souhaité poser des questions à des contributeurs francophones du Projet Fedora et de Fedora-fr.

    La diversité des profils permet de voir le fonctionnement du projet Fedora sous différents angles, au-delà de la distribution, mais aussi comment il est organisé et conçu. Certains points s’appliquent d’ailleurs à d’autres distributions.

    N’oublions pas que le Projet Fedora reste un projet mondial et un travail d’équipe, ce que ces entretiens ne permettent pas forcément de refléter. Mais la communauté francophone a la chance d’avoir suffisamment de contributeurs et de contributrices de qualité pour permettre de donner un aperçu de beaucoup de sous-projets de la distribution.

    Chaque semaine un nouvel entretien sera publié sur le forum Fedora-fr.org, LinuxFr.org et le blog de Renault.

    L’entretien du jour concerne Timothée Ravier, contributeur au Projet Fedora en particulier aux systèmes dits immuables et à l’environnement KDE Plasma.

    Entretien

    - Bonjour Timothée, peux-tu présenter brièvement ton parcours ?

    J’ai commencé à m’intéresser aux logiciels open source autour de 2004 lorsque j’ai découvert Firefox (version 1.0 à l’époque) par l’intermédiaire d’un ami qui l’a téléchargé pour moi sur un CD ré-inscriptible, car je n’avais pas encore l’ADSL à l’époque. J’ai ensuite découvert Linux avec Ubuntu 6.06. Après mes études d’ingénieur en sécurité informatique, j’ai travaillé à l’ANSSI pendant cinq ans sur le projet CLIP OS et je travaille désormais pour Red Hat où je co-dirige l’équipe CoreOS, qui est responsable de la maintenance de Fedora CoreOS et de Red Hat Enterprise Linux CoreOS pour OpenShift.

    - Peux-tu présenter brièvement tes contributions au Projet Fedora ?

    Mes contributions à Fedora sont liées à mon intérêt pour les systèmes orientés conteneurs, parfois dénommés immuables (immutable). Je fais ainsi partie de l’équipe qui maintient Fedora CoreOS, je suis un mainteneur des Fedora Atomic Desktops (principalement Silverblue et Kinoite) et je suis membre du KDE Special Interest Group (SIG).

    - Qu’est-ce qui fait que tu es venu sur Fedora et que tu y es resté ?

    Je suis passé par plusieurs distributions Linux (Ubuntu, Gentoo, Arch Linux) mais je suis désormais sur Fedora.

    Je pense que les « Four Foundations » de Fedora représentent bien mon parcours :

    Freedom : Je suis là parce que je suis intéressé par les logiciels libres, car ils permettent un partage, une mise en commun au bénéfice de tous. Features, First : C’est la force de la communauté Fedora d’un point de vue technologique. Je développe ce point dans les questions suivantes. Friends : Je me suis fait des amis dans la communauté Fedora et cela contribue à la bonne ambiance et la motivation pour continuer à contribuer.

    - Pourquoi contribuer à Fedora en particulier ?

    Je préfère être proche des projets upstream et des dernières évolutions. C’est pour cela que j’étais pendant un long moment sous Arch Linux.

    Mais le processus pour pousser des changements dans Arch Linux était plutôt flou. Il est important de noter que cela a peut-être changé désormais. Mon expérience date de plus de 6 ans et je crois qu’ils ont un processus de RFC maintenant. Le fonctionnement d’Arch Linux impose aussi des mises à jour régulières et une certaine discipline lors des mises à jour liée au modèle de développement sans version fixe.

    Je commençais alors à m’intéresser de plus en plus aux systèmes à base d’images (CoreOS Container Linux et Fedora Atomic Host à l’époque) et je suis donc allé voir Fedora Atomic Workstation (ancien nom de Silverblue) pour créer une version à base de l’environnement KDE Plasma, qui est devenue Fedora Kinoite.

    Le processus pour pousser des changements dans Fedora est ce qui fait la force de la distribution. Il permet d’obtenir des discussions et des décisions sur les évolutions à apporter à la distribution pour la prochaine version.

    - Contribues-tu à d’autres Logiciels Libres ? Si oui, lesquels et comment ?

    En dehors de Fedora, je contribue principalement au développement des projets KDE. Je fais partie de l’équipe qui maintient les applications KDE empaquetées avec Flatpak et publiées sur Flathub.

    Je contribue aussi occasionnellement à différents projets open source en fonction des besoins.

    - Utilises-tu Fedora dans un contexte professionnel ? Et pourquoi ?

    Oui, mes ordinateurs professionnels et personnels tournent sous Fedora Kinoite et mes serveurs personnels utilisent Fedora CoreOS. Une partie des serveurs que nous utilisons pour développer et produire les versions de Fedora CoreOS sont aussi sous Fedora CoreOS. D’autres sont sous Red Hat Enterprise Linux CoreOS, car ils font partie d’un cluster OpenShift.

    En gros, nous sommes aussi des utilisateurs directs des logiciels que nous développons.

    - Est-ce que tes contributions dans Fedora se font entièrement dans le cadre de ton travail ? Si non, pourquoi ?

    Une grosse partie de mes contributions se font dans le cadre de mon travail, mais toute la partie liée à KDE et aux Fedora Atomic Desktops est faite sur mon temps personnel.

    - Est-ce que être employé Red Hat te donne d’autres droits ou opportunités au sein du Projet Fedora ?

    Je n’ai pas plus de droits dans Fedora parce que je travaille pour Red Hat. Je dois suivre tous les processus de Fedora comme n’importe quel contributeur. J’ai d’ailleurs commencé à contribuer à Fedora avant d’avoir été employé par Red Hat.

    En revanche, il est indéniable que cela m’aide pour contribuer, car j’ai régulièrement l’occasion de discuter avec d’autres contributeurs Fedora dans le cadre de mon travail.

    - Tu as débuté une carrière dans la sécurité pour finalement travailler pour Red Hat en tant que mainteneur de CoreOS, Silverblue, Kinoite et contributeur à KDE, pourquoi ne pas avoir continué dans la sécurité pour cet écosystème ?

    Quelque part je continue à faire de la sécurité mais sous un autre angle. La sécurité que je faisais avant ne bénéficiait qu’à un petit nombre de personnes qui avait accès aux systèmes que l’on développait. La nouvelle version open source de CLIP OS devait rendre le système plus accessible mais le projet était complexe et je crois qu’il est désormais archivé.

    Je travaille désormais à améliorer la sécurité de Fedora CoreOS et des Fedora Atomic Desktops sans compromettre leur utilisabilité. L’objectif est de fournir une distribution Linux avec des mises à jour robustes qui soit utilisable par des non développeurs.

    - Tu participes à CoreOS pour RHEL, CentOS Stream et Fedora. Peux-tu expliquer le but de CoreOS et ses principales caractéristiques ? Quelles sont les différences entre RHEL, CentOS Stream et Fedora à ce sujet ?

    L’objectif pour les systèmes CoreOS est de faire tourner au mieux des applications dans des conteneurs. Pour Fedora CoreOS, c’est un système minimal, avec des mises à jour automatiques, proposant à la fois podman et moby-engine (Docker) installés par défaut, prêt à faire tourner des conteneurs sur un seul nœud ou dans le cadre d’un cluster Kubernetes.

    Pour Red Hat Enterprise Linux CoreOS (et CentOS Stream CoreOS), ce sont des systèmes qui forment le socle d’OpenShift (et d’OKD), une plateforme qui intègre plein de projets open source dont Kubernetes.

    Bien qu’il n’y ait pas une correspondance exacte un pour un dans la liste des logiciels inclus, Fedora CoreOS est l’upstream de CentOS Stream CoreOS et Red Hat Enterprise Linux CoreOS, de la même façon que Fedora est l’upstream de CentOS Stream, qui l’est de Red Hat Enterprise Linux.

    - L’architecture atomic a gagné du terrain sur les systèmes pour le bureau avec Silverblue et Kinoite et devient relativement populaire, peux-tu expliquer quel en est l’intérêt d’une telle conception pour ce genre de systèmes ?

    Le principal intérêt pour un utilisateur est la robustesse et rapidité des mises à jour. Celles-ci sont préparées en arrière plan alors que le système fonctionne normalement. Il suffit alors de redémarrer pour mettre à jour son système. Il n’y a pas d’attente supplémentaire ni à l’extinction ni au démarrage.

    Si une mise à jour échoue, le système reste dans l’état actuel, et il est possible de réessayer plus tard.
    Si une mise à jour introduit un problème important empêchant le démarrage du système par exemple, il est possible de redémarrer et de choisir la version précédente dans le menu de démarrage de GRUB.

    Les utilisateurs sont aussi poussés à utiliser Flatpak pour installer leurs applications graphiques et toolbox (ou distrobox) pour utiliser les applications en ligne de commandes dans des conteneurs.

    - Quels sont les défis techniques de proposer cette conception dans ces systèmes par rapport à CoreOS par exemple ?

    La principale différence est la présence d’une interface graphique. Les applications graphiques doivent être parfois adaptées pour fonctionner avec Flatpak. C’est désormais le cas de la plupart d’entre elles.

    - Tu y contribues en tant que membre de Fedora Atomic Desktops SIG, peux-tu expliquer son rôle dans Fedora et ton activité dedans ?

    Le rôle du Fedora Atomic Desktops SIG est de regrouper l’ensemble des contributeurs Fedora des différentes variantes Atomic : Silverblue, Kinoite, Sway Atomic et Budgie Atomic. Bien que chacun de ces systèmes propose un environnement de bureau distinct, ils partagent énormément d’éléments, tant au niveau des composants de base du système que de l’infrastructure Fedora. Le SIG permet donc de regrouper les contributeurs pour pouvoir les inclure dans les prises de décisions qui impactent ces systèmes.

    Je participe à la maintenance des Fedora Atomic Desktops et plus principalement de Silverblue et Kinoite. Cela peut impliquer des mises à jour de paquets, des corrections de bugs dans des projets upstream ou des rajouts de fonctionnalités pour améliorer l’expérience sur ces systèmes. Je surveille aussi que tous les Atomic Desktops continuent de recevoir des mises à jour régulièrement.

    - Penses-tu qu’un jour ces systèmes atomic deviendront la référence par défaut ? Si oui à quelle échéance ? Quelles sont les difficultés actuelles à résoudre ?

    Je l’espère ! Il est impossible de donner une échéance et cela ne dépend pas vraiment de moi. La difficulté la plus importante est la prise en charge du matériel et les pilotes qui ne sont pas intégrés dans Fedora. C’est un problème que l’on ne peut pas résoudre dans Fedora à cause des contraintes légales et qui sont traitées par le projet Universal Blue, dont la variante Bazzite (https://bazzite.gg/), est très populaire.

    - Pour la problématique des pilotes, est-ce que l’initiative du noyau unifié (d’avoir une image universelle et signée comprenant le noyau, initrd, la ligne de commande) te semble être une solution à cette problématique ?

    Ces deux sujets ne sont pas liés.

    Le problème des pilotes externes au noyau Linux upstream est divisé en deux cas principaux :

    Les pilotes propriétaires : Ils ne seront jamais ajoutés directement à Fedora pour des raisons légales et de licence. Les pilotes open source mais non inclus dans le noyau Linux upstream : Fedora met à jour le noyau Linux très régulièrement et suit les nouvelles versions stables peu de temps après leur sortie officielle. Il faut donc que ces pilotes soient mis à jour pour suivre les nouvelles versions du noyau et cela demande toujours du temps lorsque ceux-ci ne font pas partie du noyau upstream.

    Les images noyau unifiées (Unified Kernel Images ou UKI) incluent le noyau, l’initrd et la ligne de commande du noyau dans un seul fichier. Cela présente des avantages pour mettre en place une chaîne de boot mesurée, notamment à l’aide du TPM, et donc pour offrir de meilleures garanties de sécurité. Leur intégration est encore en cours dans les variantes CoreOS et Atomic Desktops.

    - Les développeurs et administrateurs systèmes ont souvent besoin d’outils qui à ce jour nécessitent souvent de recourir à rpm-ostree plutôt que Flatpak ou Fedora toolbox dans le cadre d’un système immuable. Penses-tu que ces verrous sont un réel problème et qu’ils seront éventuellement résolus dans le temps ?

    L’un des objectifs de la nouvelle initiative conteneurs bootables (« Bootable Containers ») est justement de rendre plus ergonomique la modification du système de base. Le système est distribué sous forme d’une image de conteneur standard (image OCI) et il est possible de la modifier à l’aide d’un Containerfile / Dockerfile et d’outils natifs aux conteneurs. Cela permet aux utilisateurs de ré-utiliser leurs habitudes et outils pour modifier aussi leur système de façon sûre et de partager le résultat à l’aide d’un registre d’image de conteneurs.

    Nous allons aussi ajouter à nouveau dnf (version 5) dans ces images de conteneurs pour mettre à disposition des utilisateurs une interface familière et toutes les options de dnf lors de la construction de ces images.

    Une autre piste est d’utiliser le concept des extensions systèmes de systemd (systemd system extensions ou sysexts), qui permettent d’ajouter du contenu dynamiquement à un système sans perdre les avantages de la gestion à base d’images. Les sysexts utilisent la même technologie que pour les conteneurs (overlayfs) pour ajouter des éléments (merge) au contenu des dossiers /usr et /opt de l’image de base. Je suis en train d’investiguer cette option pour rendre son usage ergonomique pour ces systèmes :

    https://github.com/travier/fedora-sysexts

    Il est aussi possible de modifier temporairement le système en utilisant un système de fichier temporaire monté au-dessus des emplacements en lecture seule (overlayfs). Les fichiers de /usr peuvent alors être modifiés et de nouveaux paquets RPM installés à la demande. Les modifications disparaîtront au redémarrage.

    - Tu participes aussi à l’équipe de KDE SIG, peux-tu expliquer son rôle dans Fedora et ton activité dedans ?

    L’objectif du KDE SIG est de proposer la meilleure expérience possible de KDE sur Fedora. Nous suivons et contribuons aussi au développement de KDE upstream.

    Je participe au KDE SIG en tant que mainteneur de Kinoite et développeur KDE.

    - GNOME reste le bureau principal de Fedora à ce jour, cependant la qualité de l’intégration de KDE progresse depuis de nombreuses années maintenant, penses-tu que la qualité entre les deux est aujourd’hui équivalente ? Est-ce que les contributions pour KDE sont freinées de par le statut de GNOME au sein du projet ?

    C’est une question très difficile, car elle est très subjective. J’utilise principalement KDE sur mes systèmes, mais j’apprécie énormément le travail de design fait sur GNOME. Pour moi c’est un choix personnel.

    D’un point de vue technologique, il est possible de trouver des éléments “meilleurs” dans GNOME que dans KDE et l’inverse.

    Il n’y a pas de bénéfice à opposer ces deux projets. C’est au contraire la collaboration qui améliore l’expérience utilisateur.

    Je ne pense pas que les contributions à KDE soient freinées par le status de GNOME dans Fedora.

    - L’équipe KDE SIG a récemment proposé d’améliorer le statut de KDE au sein du projet, quitte à même remplacer GNOME pour Fedora Workstation, peux-tu expliquer cette demande ? Penses-tu qu’un jour KDE remplacera GNOME au sein de Fedora ou de RHEL par exemple ?

    L’idée des membres soutenant cette proposition (qui ne vient pas uniquement de personnes faisant partie du KDE SIG) est de remettre en question la place de GNOME « par défaut » dans le projet Fedora (notamment Fedora Workstation). Poser cette question force le projet à clarifier les critères qui font qu’un environnement de bureau est considéré comme majeur et donc autorisé à être représenté par une “édition” comme Fedora Workstation. Tous les environnements de bureau non-GNOME ne sont actuellement pas bien présentés sur le site de Fedora notamment.

    Il est important pour un projet communautaire de pouvoir justifier ses choix, que l’on soit d’accord ou non avec les arguments présentés. Si ces choix sont perçus comme arbitraires (« c’est comme ça que cela a toujours été », « c’est un employé de Red Hat qui l’a décidé »), alors le projet Fedora perd en crédibilité. Il faut, par exemple, pouvoir justifier que GNOME est un bon choix à présenter aux utilisateurs découvrant Fedora.

    Je ne pense pas que KDE va “remplacer” GNOME dans Fedora et ce n’est pas vraiment l’idée derrière cette proposition qui a été formulée explicitement de la sorte pour forcer la discussion. L’objectif est de rendre KDE plus visible dans Fedora.

    Pour ce qui est de remplacer GNOME dans RHEL, c’est peu probable et cela serait une décision de Red Hat.

    - Penses-tu que Fedora est une distribution de référence pour utiliser KDE aujourd’hui ? Par le passé OpenSUSE, Kubuntu ou Mageia étaient souvent recommandées pour utiliser cet environnement.

    Oui ! 🙂

    Fedora propose depuis plusieurs années les dernières versions de KDE à des fréquences très proches des sorties upstream. Nous sommes actuellement l’une des premières distributions à proposer le bureau KDE Plasma dans sa version 6. Le KDE SIG suit et participe activement au développement de KDE upstream et certains développeurs KDE recommandent désormais Fedora.

    Je travaille avec Fedora Kinoite à rendre le développement de KDE plus abordable, notamment pour le test des versions en cours de développement.

    - Si tu avais la possibilité de changer quelque chose dans la distribution Fedora ou dans sa manière de fonctionner, qu’est-ce que ce serait ?

    Je regrouperai l’intégralité des dépôts Git, codes sources, projets, suivi des bugs, etc. sur une (ou plusieurs) instance GitLab hébergée par le projet Fedora. C’est un projet qui est désormais en cours pour migrer vers Forgejo. Finies les instances Pagure (forge de développement Git), plus de Bugzilla (suivi des bugs). Il faudrait aussi abandonner les listes de diffusion pour utiliser Discourse à la place (transition aussi en cours).

    D’un point de vue personnel, la migration du projet KDE vers GitLab fut un facteur déterminant dans ma capacité à contribuer au projet KDE. Le mode de contributions à l’aide de Pull Requests / Merge Requests à travers une interface web est devenu un standard qui réduit significativement la difficulté pour un premier contributeur à participer à un projet.

    Je pense que c’est la prochaine étape importante pour rendre le développement de Fedora plus accessible et donc pour attirer plus de contributeurs.

    - À l’inverse, est-ce qu’il y a quelque chose que tu souhaiterais conserver à tout prix dans la distribution ou le projet en lui-même ?

    Le processus pour proposer un changement (Change Process). C’est la clé de ce qui fait de Fedora une distribution à la pointe, qui évolue à chaque nouvelle version et qui pousse l’écosystème en avant.

    - Que penses-tu de la communauté Fedora-fr que ce soit son évolution et sa situation actuelle ? Qu’est-ce que tu améliorerais si tu en avais la possibilité ?

    Malheureusement, je n’ai pas eu beaucoup d’interactions avec la communauté Fedora-fr, donc je n’ai pas grand-chose à dire.

    - Quelque chose à ajouter ?

    Merci pour l’entretien !

    Si vous souhaitez en apprendre plus sur ces systèmes, je vous recommande les documentations officielles des projets ou les présentations que j’ai réalisées (une ou deux en français).

    - Merci Timothée pour ta contribution !

    Conclusion

    Nous espérons que cet entretien vous a permis d’en découvrir un peu plus sur les systèmes immuables de Fedora et l’environnement KDE Plasma.

    Si vous avez des questions ou que vous souhaitez participer au Projet Fedora ou Fedora-fr, ou simplement l’utiliser et l’installer sur votre machine, n’hésitez pas à en discuter avec nous en commentaire ou sur le forum Fedora-fr.

    Prochain entretien avec Thomas Canniot, ancien traducteur de Fedora en français et fondateur de l’association Fedora-fr.

    – Source : https://linuxfr.org/news/20-ans-de-fedora-fr-quatrieme-entretien-avec-timothee-contributeur-des-systemes-immuables-et-kde